La Terre ou le Globe ?

Juin 06, 2023

Globe

Article publié dans les Echos le 5 juin 2023. Par Jean-Christophe Fromantin, président du programme Anticipations

Ce nouveau cycle Anticipations a été marqué par une ouverture vers les réalités humaines – ce que Gregory Quenet appelle « le terrestre » en réponse à la notion de « globe » dont les dernières décennies ont marqué l’acuité -. En réponse aussi à l’essayiste Thomas Friedmann qui, dans son ouvrage de 2005 annonçait « La terre est plate, une brève histoire du XXIe siècle » au motif d’une dilution des frontières et d’une uniformisation de nos modes de vie et de travail. Alors, la Terre ou le Globe ? Cette question fût au cœur des anticipations que nous avons étudiées lors du cycle 2023 : « Le terrestre est un fondement d’où on peut tirer la poétique de la Terre » (Gregory Quenet, Anticipations 2023). Cette poésie, c’est la part de métaphysique et d’émerveillement nécessaires à notre équilibre ; ce que le sociologue allemand Hartmut Rosa appelle notre relation (authentique et fondamentale) au monde et à la nature (Résonnance, 2021).

« Les signaux faibles observés par les uns et les autres ouvrent vers un paradigme plutôt inattendu à l’avantage du « terrestre » »

Les signaux faibles observés par les uns et les autres vont dans ce sens. Ils ouvrent vers un paradigme plutôt inattendu à l’avantage du « terrestre » :  les échelles de proximité sont priorisées, les circuits courts s’invitent dans les dynamiques économiques, les énergies renouvelables se territorialisent, l’émergence des critères extra-financiers dans les évaluations économiques annoncent une prise de conscience de la prévalence des réalités humaines ; et une génération alpha, qui sera sur le marché de l’emploi en 2030 qui s’imagine plus libre que jamais. Si on ajoute que le temps de travail rémunéré diminue inexorablement jusqu’à passer – probablement au cours de la prochaine décennie – en deçà des 10% du temps de notre existence, on peut s’interroger sur l’évolution de nos projets de vie et sur le sens que nous chercherons à leur donner : plus enracinés, plus terrestres, plus humains ? C’est aussi l’objectif que l’on peut assigner aux technologies ; faciliter la réalisation de nos projets, nous libérer des injonctions centralisatrices et nous permettre de rouvrir une part d’imaginaire…

 Pour prolonger cette réflexion, nous concluons notre cycle autour de la question suivante : Le bien-être et les technologies, sont-ils les composantes d’un nouveau paradigme socio-économique ? Une question qui interpelle nos modèles traditionnels ; qui introduit les discontinuités dans l’appréhension des enjeux. Christian de Boissieu pointait la non-linéarité des modèles qui ébranle nos certitudes et provoque les crises que l’on connait. Revenir à l’échelle humaine, doit nous amener à mieux écouter les historiens, les géographes ou les sociologues, car si le globe est lisse, la Terre, elle, nous entraine dans ses reliefs et ses saisons. Et c’est évidemment la Terre qui aura le dernier mot….

Merci à tous ceux qui ont participé à cette session 2023, aux intervenants, à Nicolas Lerner, Directeur général de la DGSI (Direction générale de la Sécurité Intérieure) qui a accompagné ce cycle ; au Collège des Bernardins et à SIA Partners pour leurs précieuses contributions ; à l’économiste Claudia Senik, à Éric Labaye, Président de l’Institut Polytechnique de Paris et à Éric Chol, Directeur de la Rédaction de l’Express qui animent la session conclusive.

Jean-Christophe Fromantin

Délégué général d’Anticipations
Maire de Neuilly-sur-Seine