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L’URGENCE D’ANTICIPER OU LE RISQUE DE S’EFFONDRER

Jean-François Rial, Président de Voyageurs du Monde et Jean-Christophe Fromantin, délégué général d’Anticipations, chercheur associé à la chaire ETI-IAE de l’université Panthéon-Sorbonne. Tribune parue dans Les Echos le 10 octobre 2024.

Les crises, économique, écologique, sociale ou géopolitique, dont la technologie précipite l’intensité, ne procèdent-elles pas de quelques déterminants communs ? La question se pose à double titre : elles génèrent des effets plus sensibles pour les populations ; l’engagement économique, social ou politique se dissout dans un sentiment d’impuissance, voire de résignation. Les tensions sont fortes entre la profondeur des défis et la superficialité des décisions.

L’anticipation nait de ce constat, et de la nécessité d’engager une approche holistique et audacieuse des enjeux. Car traiter les crises, les unes après les autres, avec au mieux des mesures de moyen terme, au pire des rustines, est l’assurance qu’elles s’enchainent, à des rythmes plus rapides, aux conséquences plus délétères ; les traiter techniquement, avec plus de normes et de règlements, en relativisant le déterminant humain, participe d’un court-termisme qui n’ouvre pas non plus vers des réponses durables.

Mais l’anticipation n’est pas tant une méthode qu’une culture. Elle ne s’enseigne pas dans les universités ; elle relève de dispositions personnelles ou collectives qu’il nous appartient de cultiver. Nous n’allons pas dans ce sens : le confort de l’entre soi, l’étanchéité des silos, la spécialisation des tâches, les chaines de valeurs, nous isolent des réalités du monde. Pire : nos enfermements nous laissent à croire que nous pourrions tout résoudre. La complexité du monde, nos interdépendances et l’accélération des changements doivent nous amener à casser cette conviction que les processus opèrent dans un développement linéaire, que nos silos sont solides et que nos constructions sont inébranlables. Les crises démontrent la fragilité des certitudes dont nous sommes perclus.

Comment faire prospérer cette culture de l’anticipation ?

D’abord en acceptant un principe : se laisser déstabiliser aujourd’hui pour ne pas s’écrouler demain ! C’est le plus difficile. Car nos enfermements rendent ce prérequis sensible. Identifions néanmoins trois principes à notre portée :

L’information d’abord, au sens large. L’exercice est difficile compte-tenu du flot d’informations disponibles. Mais s’informer n’est pas tant une question de volume qu’un exercice d’ouverture. Lire, voyager, écouter, diversifier ses sources est le premier outil pour capter les signaux faibles
et s’extraire de la routine. Fort d’une curiosité intense, nous évitons les biais cognitifs et nous stimulons notre esprit critique.

Être agile pour casser les inerties. C’est le deuxième principe. Nos organisations sont trop lentes et hésitantes pour suivre la vitesse des changements. Quelle est l’efficacité d’une réunion à 10 ou 15 au cours de laquelle défile une centaine de slides perclus de textes, de schémas et d’histogrammes ? Nos codes et nos hiérarchies, bien que nécessaires, ne doivent pas devenir la fin, mais rester des moyens. Car le temps occupé à faire vivre des systèmes s’oppose à celui de la créativité et de l’audace

La troisième idée procède des deux précédentes : l’hybridation, ou la fertilisation croisée entre différents univers. Notre société est organisée à rebours de cette nécessité : les « politiques », les « entrepreneurs » ou les « universitaires » vivent dans des mondes séparés, jusqu’à acquérir la conviction sincère, que le passage de l’un à l’autre est impossible, voire inutile. Or, la valeur se crée dans ces croisements fertiles. Les corporatismes ou les communautarismes participent de cette segmentation d’où naissent les tensions et les fractures. Hybrider est autant une promesse d’efficacité, de reconnaissance, que d’altérité féconde.

Au-delà des principes, l’anticipation interroge nos marges de manœuvre. Le souffle de nos organisations et leur prospérité ne peuvent plus s’accommoder d’une réduction de notre champ de vision, au risque que les cycles de destruction gagnent sur ceux d’un authentique progrès. L’exercice d’anticipation ouvre cette grande respiration.
« L’homme a perdu la capacité de prévoir et d’anticiper, il finira par détruire la terre » prédisait Albert Schweitzer. Nous y sommes presque. Anticipons …

ANTICIPATIONS 2025

Jean-François Rial, président de Voyageurs du Monde, parrain de la session 2025

Originaire du Cantal, passionné de voyages, Jean-François Rial, est PDG du groupe Voyageurs du Monde et ancien président de l’Office du tourisme et des congrès de Paris (2021-23). Il défend, à travers le développement de son entreprise, un tourisme responsable, visant à réconcilier éthique et efficacité économique. Il est aussi président du Refettorio Paris, restaurant qui offre aux sans-abris et aux réfugiés des repas concoctés par de grands chefs de passage, dans un cadre artistique. 

Les explorations

Ontologie – Thèmes traités et intervenants

Ce terme fait référence à un domaine de la philosophie qui traite de la question de l’être. L’ontologie invite à s’interroger sur le temps, le devenir, le sens de l’existence ou au contraire sur son caractère absurde. Vaste sujet, que l’on ne peut évidemment pas embrasser en quelques heures. Nous avons choisi trois explorations :

• La première, autour de l’enjeu environnemental, s’appuie sur les travaux de Bruno Latour et inviteà concevoir de nouvelles façons de vivre avec la capacité à utiliser les existants et à les transformer : une écologie d’héritage, de réconciliation sans baisser les exigences.
  • « Retour à la Terre ». Professeur Gregory QUENET, historien, pionnier de l’histoire environnementale en France.

Pour aller plus loin, lecture de la tribune « Pathologies métropolitaines » par Jean-Christophe Fromantin, Délégué général Anticipations, Pr Franck Baylé, Psychiatre. Article paru dans Les Echos le 12 mars 2025

Modèles économiques – Thèmes traités et intervenants

Cet atelier a exploré trois domaines touchés par des mutations ou transformations susceptibles d’avoir des impacts majeurs sur nos économies.

• Nous avons abordé la construction de nos modèles assurantiels, et pourquoi dans un monde soumis à des risques nouveaux (climatiques, technologiques, cyber…) nous pourrions être amenés à reconsidérer des habitudes, des attitudes et des investissements avec des conséquences économiques, sociales et sociétales extrêmement vastes.
  • «Assurer l’inassurable, de quoi parle-t-on ?» Christian WALTER, actuaire agrégé, titulaire de la chaire « Éthique et Finance » du Collège d’études mondiales de la FMSH.
• Un deuxième atelier a proposé une vision à 360° des nouvelles technologies et des anticipations que l’on peut formuler quant aux opportunités et risques en germe qu’elles apportent.
  • Où en est la Tech ? Christophe AULNETTE, ancien Président de Microsoft Asie du Sud et de Microsoft France.

Pour aller plus loin, lecture de la tribune « Le spatial s’apparente à une nouvelle géographie du progrès » François Alter, conseiller du Président du CNES ; Emmanuel de Lipkowski, PDG et cofondateur de Hyperion Stellar Technologies ; Jean–Christophe Fromantin, délégué général du programme Anticipations. Article paru dans Les Echos le 25 avril 2025.

Géopolitique – Thèmes traités et intervenants

Cette session s’est déroulée au sein même des locaux de la DGRIS (Direction Générale des Relations Internationales et de le Stratégie) où nous avons été accueillis par le Général Eric PELTIER, Directeur général adjoint de la DGRIS. Dans un contexte de fortes tensions internationales qui peuvent voir en quelques heures basculer des équilibres mondiaux, son intervention a permis d’approcher la vision qu’ont nos institutions de défense de l’état du monde actuel.
Cette vision large a été complétée par deux explorations, mêlant perspectives géopolitiques et sectorielles : l’évolution des blockchains et cryptomonnaies et souveraineté alimentaire dans un monde en guerre. Bien que très différentes elles permettent d’anticiper des transformations profondes et interrogent nos consciences sur les valeurs et les principes que nous souhaitons dans le monde de demain.

Pour aller plus loin, lecture de la tribune « L’Europe au défi de la « désoccidentalisation » du monde » de Jean-Christophe Fromantin, parue dans La Tribune le 24 avril 2025.

INSCRIPTIONS

Merci de prendre contact auprès de Mireille Bertrand +33 6 23 45 56 10 ou mbertrand@anticipations.org

Le coût du programme est de 15000 euros (dispensé de TVA), variable selon la nature et la taille de l’entreprise (fondations ou associations, entreprises, administrations publiques, institutions de recherche et enseignement…).

Le dossier d’inscription comprend un CV, un écrit où chaque candidat exprimera ses motivations pour participer au programme et les problématiques d’anticipation et d’avenir telles qu’il les perçoit. Les organisateurs valideront l’inscription après analyse du dossier avec le Conseil d’orientation.

Anticipations est un prestataire de formation enregistré sous le numéro 11756471575. Cet enregistrement ne vaut pas agrément par l’État.